mardi 10 avril 2012

Avis aux exploitants de salles : espacez les séances !

Si la qualité seule du film faisait tout le plaisir de l’expérience cinématographique, je me contenterais souvent de rester chez moi pour voir les longs-métrages en DVD. Mais ce n’est pas aussi simple que cela, pas pour moi ni pour bon nombre d’autres spectateurs assidus j’en suis sûr. Au cinéma, chaque détail compte pour que le plaisir soit entier.

Dans un monde parfait, les projections se dérouleraient sans perturbation aucune. Le son ne cracherait pas, le voisin de derrière ne donnerait pas de coups de pieds dans le fauteuil, tout le monde éteindrait son portable et rien ne viendrait gâcher le film. Souvent les spectateurs sont coupables des gênes éprouvées… allez, disons-le, la plupart du temps. L’enfer c’est les autres disait l’autre, ajoutons « même au cinéma ». Surtout au cinéma ?

Je passe suffisamment de temps sur ce blog à raconter tout ce qui me gâche les projections auxquelles j’assiste pour que l’on puisse croire que je préfèrerais rester chez moi voir les films seuls, mais ce n’est pas le cas. J’aime la salle, j’aime la communion entre spectateurs, même s’ils ne sont pas tous toujours irréprochables. D’autant qu’ils ne sont donc pas les seuls coupables de ce qui ne tourne pas rond dans les salles de cinéma. Les responsables de celles-ci auraient parfois eux aussi leur mea culpa à faire.

L’un des exemples les plus concrets qui soit dans ce que gèrent (trop souvent) mal les cinémas, c’est l’arrangement des horaires des séances. Cela fait des années que cela dure et j’ai il y a quelques semaines vécu cela une fois de trop, une fois qui me pousse aujourd’hui à écrire ma lassitude sur la question. L’objet concret de mon courroux ? Le manque d’espacement entre les séances. Certaines salles veulent caser le maximum de projections possibles dans une journée, et pour ce faire rapprochent le plus possibles les séances, ne laissant souvent que deux ou trois minutes entre le moment où un film se termine et celui où la séance suivante commence. Fin du film à 13h57, séance suivante à 14h ! Lorsque le cinéma est peu fréquenté et la salle petite, cela peut s’avérer moins gênant. A peine.

Car le temps que le public quitte la salle et que les portes s’ouvrent pour la fameuse séance suivante, à peine les spectateurs pénètrent-ils dans la salle que celle-ci s’assombrit et les bandes-annonces apparaissent à l’écran. On se marche à moitié dessus  entre spectateurs tâtonnant, on rate les précieuses bandes-annonces, et finalement avant même d’avoir eu le temps de dire « Ouf », le film commence. Allez allez, on se dépêche, on sert au maximum pour caler une séance de plus, le 7ème Art est fourni à la chaîne !

Comment cela, les spectateurs aiment avoir le temps de choisir leur place dans la salle sans être bousculés par 300 autres personnes qui entrent en même temps ? Comment cela, les spectateurs aiment regarder les bandes-annonces et non pas entrer alors qu’elles se déroulent (dans certains cas, les salles gagnent même du temps en ne projetant pas de bandes-annonces…) ? Comment cela, les spectateurs veulent rester assis jusqu’à la fin du générique final et prendre leur temps pour quitter le film, se relever, se rhabiller et retrouver le monde extérieur ? Mais ils croient quoi les spectateurs, que le cinéma est un art qui se savoure comme l’on reste plongé devant un tableau ou que l’on laisse un livre s’infiltrer en nous ??

Bah… oui. Oui, mesdames et messieurs les exploitants. Aussi étrange que cela puisse paraître à certains d’entre vous (je ne vous mets pas tous dans le même sac), les spectateurs aiment à profiter de leurs expériences cinéphiles. J’ai employé le terme « savourer » un peu plus haut, et si nous aimerions toujours être accueillis de façon gastronomique, trop souvent vous nous réservez plutôt l’accueil d’un fast-food.

Lorsque je me déplace dans un cinéma et que celui-ci me fait poireauter devant la salle jusqu’à la dernière seconde, me fait entrer dans la bousculade parce que tout le monde entre (du coup) en même temps, me fait rater les bandes-annonces  et qu’en plus, alors que le générique est à peine terminé et que je suis encore scotché au fauteuil parce que le film que je viens de voir m’a remué, l’un de vos employés vient me gâcher ce moment de flottement intense pour me dire de me dépêcher parce que la séance suivante commence dans une minute, je quitte le cinéma en pestant et en me disant que la prochaine fois, j’irai ailleurs.

Multiplexe ou indépendant, j’ai déjà maugréé dans les deux, du Champo à l’UGC Ciné Cité Les Halles. Ce dernier, que je fréquente souvent, est l’un des champions toutes catégories des séances collées les unes aux autres. Première séance à 9h et des poussières, dernière à 22h30, et entre ces deux horaires, tout est calculé pour que les séances coïncident et que le cinéma engrange plus de spectateurs, et donc plus d’argent, en ne laissant parfois que quelques secondes (sérieusement) entre le moment où le premier spectateur entre en salle et le début de la séance, au mépris de toute notion de confort et de plaisir pour le spectateur.

Lorsque c’est une salle pleine de 400 ou 500 spectateurs qui sont tous restés jusqu’à la fin du générique parce qu’il s’y passait quelque chose et que ces centaines de spectateurs doivent tous sortir en même temps par la même porte, la machine se grippe encore plus et la séance suivante (aka, les bandes-annonces) commence alors même que tout le monde n’a pas encore quitté la salle. Il y a quelques semaines aux Halles, alors que j’allais voir Alois Nebel, le beau film d’animation tchèque, c’est un autre problème qui s’est posé. Trois salles les unes à côté des autres passaient trois films commençant à la même heure et étaient contrôlées par un même employé du cinéma. Alors que la séance précédente d’Alois Nebel était terminée et la salle donc vide et attendant ses spectateurs, interdiction d’entrer en salle car l’ouvreur préférait que les deux autres films dont l’un serait fini trois minutes plus tard, l’autre cinq minutes plus tard, soient également achevés pour faire entrer les trois salles en même temps.

Et alors qu’Alois Nebel bénéficiait d’une dizaine de minutes de battement, et que nous aurions donc pu entrer en salle tranquillement, les deux autres se terminaient peu de temps avant le début de la séance suivante. Nous avons donc dû attendre le dernier moment, et comme à cet instant, l’ouvreur devait contrôler trois salles de spectateurs en même temps, cela prit un temps fou et le temps que nous entrions en salle, les bandes-annonces avaient bien sûr commencé sans nous.

J’en reviens donc au mépris du confort et du plaisir du spectateur parfois affiché par les cinémas. N’êtes-vous donc pas vous-mêmes cinéphiles, mesdames et messieurs les exploitants ? Avez-vous donc oublié ce qui fait le sel du cinéma ? Pouvoir entrer sans se presser et laisser l’atmosphère de la salle se fondre en vous… S’asseoir sans que l’on ait à se bagarrer avec un autre spectateur… Pouvoir se délecter des bandes-annonces qui nous donneront envie de revenir quelques jours plus tard… Laisser le film s’installer en nous à mesure que le générique de fin défile… Pouvoir quitter la salle à son rythme, le regard encore dans le vague… Et se dire que décidément, même si tous les spectateurs ne sont pas exemplaires, même si tous les films ne sont pas mémorables, il se passe quelque chose dans une salle de cinéma qui fait qu’y revenir est un désir irrépressible. C’est fou ce que quelques minutes de souplesse dans les horaires offre de plaisir…

9 commentaires:

Martin a dit…

Ah, David ! Content de te relire ! Tu m'avais manqué, camarade !

Bon, je suis assez d'accord avec toi sur beaucoup des choses écrites ici. Un générique doit pouvoir se regarder jusqu'au bout et, idéalement, pas lumière allumée d'un bout à l'autre ! On doit avoir le temps de trouver sa place parfaite en arrivant... au moins parmi celles qui restent :) Et le cinéma est aussi un art qui se vit en salles et en communion avec d'autres... plus ou moins attentifs et respectueux, c'est clair, mais il faut assumer cet aléa, je suis d'accord avec toi.

Le seul point sur lequel je mets un bémol par rapport à toi, c'est au sujet des bandes annonces. Quand on va souvent au cinéma, on voit souvent les mêmes et parfois certaines sont franchement ratées. Elles dévoilent trop plutôt que de simplement donner envie. J'aime autant ne rien voir que de voir trop, en l'occurrence. Donc je me passe de bandes annonces, la plupart du temps, quand je peux. Et que je résiste encore un peu à un film que j'attends depuis belle lurette.

Outre les BA, je pense, ce qui me dérange le plus, dans les pré-séances, ce sont les pubs. Je comprends qu'elles soient nécessaires à la rentabilité du cinéma, mais ça m'est toujours pénible de voir une pub pour bagnoles ou le resto du coin avant un film. Bon, c'est mieux que pendant, cela dit, alors je souffre en silence ;-)

Et donc, welcome back, ami cinéphile ! Râle pas trop si tu reviens de vacances et parle-nous vite de tes derniers coups de coeur ciné !

I.D. a dit…

Un presque pamphlet, joli. Je ne peux que te rejoindre dans cette démarche. Malheureusement comme tout et partout, les choses changent et pas forcément en bon.

Quant aux BA ou au pub, ça fait parti d'un folklo' dont je me passe aisément. Maintenant, je comprends que ça puisse énerver puisqu'elles font parti d'une ambiance globale.

Toujours plus de séance, toujours plus de profit, on en est là !

L'anecdote que tu racontes sur l'organisation de cet employé qui attend la sortie de deux salles pour faire entrer le public de 3 films tout en même temps m'interpelle. Drôle d'organisation. Je n'ai jamais travaillé au sein d'un cinéma mais pour avoir géré des commerces et donc du personnel, je trouve cela bizarre comme choix de fonctionnement. Il y a un truc qui m'échappe. Bref.

David Tredler a dit…

@Martin : Les bandes-annonces, c'est un éternel débat. Il n'y a rien de plus excitant que de découvrir un film sans en avoir vu la moindre image, sans savoir un instant ce dans quoi on s'embarque en s'asseyant dans la salle. Mais en même temps, l'art de la bande-annonce me fascine et je ne peux que rarement résister à la découverte de ces première images d'une film que j'attends impatiemment. Certaines BA m'ont découragé de voir certains longs, d'autres ont éveillé la curiosité pour des oeuvres qui me seraient peut-être passées sous le nez sans elles.
Par contre les pubs, rien à faire, moins y en a, mieux on se porte ;)
Merci pour l'accueil en tout cas Martin !

@ID :Merci pour le "presque pamphlet" l'ami ;)
Les bandes-annonces font partie de l'ambiance d'une séance, tu as tout à fait raison.
Quant à l'anecdote, j'espère que cela arrivera jusque sous le nez des gens d'UGC et que ça ne se reproduira plus ;)

wildgunslinger a dit…

Il y a autre chose qui me dérange pas mal: quand tu arrives en avance pour avoir une bonne place, à l'endroit où tu veux dans la salle et sans personne mesurant 2m devant toi. Quand la salle se remplit, les gens du cinéma sont capables de venir te demander de te décaler pour permettre à des retardataires de prendre ta place et tu te retrouves à un endroit moins bon. Quand ça arrive, je refuse et j'ai déjà vu d'autres personnes le faire. C'est un truc vraiment énervant. Bon, voilà, j'ai vidé mon sac ;-)

David Tredler a dit…

N'aie pas honte wildgunslinger d'avoir déballé ton sac, pour le maniaque du placement que je suis dans une salle de cinéma, devoir me décaler pour des gens qui arrivent à la dernière minute, je trouve ça souvent insupportable.

3Moopydelfy a dit…

Tred tu m'avais manqué! Non c'est vrai quoi mes lectures du matin se sentaient tristounes sans toi. (pardon effusion tout ça)

Tu en avais gros sur le coeur dis donc ^^

Une séance cinéma se savoure comme tu le soulignes si bien.

Pour les salles, la dernière fois séance Marsupilami j'ai manqué d'être mise dehors ^^ j'ai attendu jusqu'à la fin campée sur mon siège.

J'aime venir un peu en avance, m'installer tranquillement à une place où je serai bien. Genre sans cheveux à la Jackson five devant moi, pas sur les côtés, ni avec un grand de plus 1m85, parce que sinon je vois plus rien.
Manque de chance, dans le cinéma d'art et d'essai de ma ville, ils aiment faire poireauter toutes les salles et les ouvrir d'un coup. Bonjour la cohue. Quand ils t'annulent pas une séance sans prévenir. "vous avez qu'à revenir plus tard". Le tout avec un ton pas franchement très agréable.

Les publicités, je ne les regarde pas, j'avoue que j'ai souvent le nez sur mon livre ou les écouteurs ^^. En vrai, je suis un peu un petit ours dans son univers, un peu comme les enfants ^^" . Je m'immerge souvent dans les films que je vois. J'apprécie la tranquillité et pas forcément de poser mes émotions direct à vifs après. Puis me faire bousculer, ça me perturbe.

Pour les BA je les aime uniquement au cinéma. (enfin quand c'est pas 100 fois la même car "A l'aveugle" je peux plus la voir en peinture) Etrange petit padawan ne clique que très rarement sur le net pour les visionner.

Sur ce, j'ai pris "le Meilleur" histoire de continuer ma quête de la balle ^^ J'ai aucun souvenir de l'avoir bu contrairement à "Jusqu'au bout du rêve"

David Tredler a dit…

N'en jette plus Moopy je vais me croire important si tu me dis que j'égaye tes lectures matinales... mais ça fait plaisir ;)

Oui j'en avais gros sur le coeur, j'espère surtout qu'il y a des gens directement responsables de ce dont je parle qui vont lire ce billet.

Je vois qu'on est le même genre de spectateur, à aimer arriver en avance pour bien choisir sa place sans être pressé. Les pubs, si je suis seul au ciné, en général je lis pendant qu'elles passent, en levant le nez quand une bande-annonce apparaît à l'écran.
Quand un film se termine (après le générique^^), j'aime prendre mon temps, et je déteste quand à peine la dernière image du film passée, à peine le générique de fin commencé, on se tourne vers moi en me demandant ce que j'en ai pensé. Deux minutes quoi, il faut laisser le film infuser !

Pour le zieutage de bandes-annonces, je ne fait pas le padawan, et j'ai tendance à les regarder dès qu'elles sont en ligne...

"Le Meilleur", je ne l'ai jamais vu, pourtant quand j'étais gamin ma mère m'en a montré des films avec Redford. Tu me diras si c'est aussi bien que "Jusqu'au bout du rêve" ;)

Phil Siné a dit…

ah oui le champo est assez fort aussi pour les séances qui se suivent de très très près... :'(
tu me donnes une raison supplémentaire de boycotté les halles ! (en plus du monde, de ce lieu enterré hyper anxyogène, du côté "public ugc"...)
pour les bandes annonces qui commencent sans les spectateurs, moi m'en fiche j'aime pas les pré programmes... mais ça pourrait rendre furieux des distributeurs qui paient parfois des fortunes pour qu'on diffuse leur bande annonce... (enfin plus elle est proche du film et dans la pénombre, plus c'est cher je crois... ;)

David Tredler a dit…

Mais je peux aussi te donner plein de raisons de ne pas boycotter les Halles si tu veux Phil ;) Malgré cela, je reste un fidèle du cinéma en sous-sol. Peut-être parce que chaque cinéma, et pas seulement Les Halles malheureusement, est émaillé de problèmes, que ce soit d'organisation ou de spectateurs, mais il y a aussi d'autres raisons. Quant au public, pour fréquenter presque tous les cinémas de Paris, pour ce qui est des multiplexes parisiens, sa fréquentation est sans l'ombre d'un doute l'une des meilleures ;)
Mais bon, maintenant que je n'habite plus à côté, je suppose que je vais y aller moins souvent...

Sinon aux Halles les premières bandes-annonces sont celles projetées par le cinéma, celles payées par le distributeurs arrivent plus tard, donc ceux-ci peuvent dormir tranquilles !

over-blog.com